20 / 04 / 2022

La lacto-fermentation : les conseils de Shira

La fermentation, qui fait de plus en plus parler de ses intentions, n’est certainement pas un effet de mode, ni même un simple moyen de réensemencer notre microbiote. C’est au départ un moyen de conservation et de modification des aliments dans le but de les rendre comestibles. Dix mille ans avant notre ère, certains aliments devenaient mangeables après avoir subi l’étape de la fermentation. 


Mais alors, qu’est-ce que la fermentation et qu’apporte-t-elle ? 


La fermentation est un mécanisme de transformation des aliments sous l’action d’enzymes que sécrètent des micro-organismes en développant de l’acide lactique. Ces micro-organismes, parmi lesquels des bactéries, modifient particulièrement les glucides des micro-nutriments en acide, en gaz voire en alcool, pour le sucre. Par la prédigestion et le développement de l’acide lactique, l’indice glycémique est abaissé. Réduire l’indice glycémique des aliments offre une sensation de satiété beaucoup plus rapide et durable. En consommant les sucres des végétaux, la fermentation permet aussi de réduire l’apport calorique du bol alimentaire. Si l’on pense surtout à la lacto-fermentation, avec la vision des conserves en bocal de verre et ces végétaux immergés dans leur saumure, il existe d’autres formes de fermentation, avec la fermentation des céréales, des légumineuses et le levain. 

Ce dernier ne vous est sans doute pas inconnu et permet au pain d’être plus digeste même lorsque l’on parle de gluten. En effet, le levain, en prédigérant le gluten, le rend mieux assimilable. La fermentation est une technique très simple s’adressant à tous sans connaissance culinaire particulière. À ceux qui pensent découvrir ce procédé, il y a fort à parier que vous avez déjà consommé des aliments fermentés sans le savoir. Pensez à la choucroute. Ce chou au goût relevé et inimitable est un chou lacto-fermenté à sec.

Les conseils incontournables de Shira Benarroch 


Qu’ils soient légumes, fruits ou encore aromates, les végétaux se comportent tous différemment selon leurs caractéristiques. Shira Benarroch partage son expérience pour nous aider à y voir plus clair.


Caractéristiques et comportements des végétaux 


 - Les légumes racines (carotte, betterave, radis, chou-rave, navet…) se prêtent parfaitement à la lacto-fermentation. Ils offrent une texture croquante et un goût parfumé. 

- Les choux crus ont souvent des fibres dures et une saveur âcre et soufrée. Celle-ci est adoucie par l’action de la lacto-fermentation. Avec la fermentation, et la combinaison d’aromates, de nouveaux arômes se développent, les fibres sont attendries et offrent une approche inédite de la dégustation. 

- Les légumes verts et légumes feuilles voient aussi l’amertume s’effacer au bout de 1 mois de fermentation. Si vous précuisez un légume avant une mise en lacto-fermentation, faites-le à la vapeur douce (au Vitaliseur, par exemple). Le légume doit rester al dente. Puis ajoutez à la saumure un activateur pour apporter des bactéries lactiques. 

- Ajouter des aromates est très intéressant à plusieurs niveaux en lacto-fermentation. Grains de poivre, de fenouil, de cumin, piment, baies de genièvre, aneth, laurier, estragon, laurier, sarriette, ail, gingembre, curcuma sont riches en saveurs et apportent des minéraux et des oligo-éléments. De plus, l’action antiseptique des épices va aider à inhiber le développement des mauvaises bactéries, lors de la première phase de fermentation. Enfin, la fermentation adoucit leur puissance piquante. 

- Citrons jaunes, bergamotes, oranges sanguines, kumquats, avec la fermentation, vous pourrez réaliser des agrumes confits au sel. Ils vous permettront de parfumer vos sauces, salades, plats et légumes. Les agrumes sont intéressants pour assaisonner les fermentations légères et courtes. Leur acidité favorise la fermentation lactique. Attention à l’amertume des agrumes comme le cédrat ou l’orange amère si vous conservez le zist (membrane blanche située entre l’écorce et la pulpe, ndlr) ! Il faut les faire fermenter plus de 6 mois pour que celle-ci disparaisse. 

- Les algues fraîches en tsukemono (technique de conservation par macération, ndlr) ou en pesto, comme la laitue de mer, la dulse, le wakamé ou l’algue nori (ou les algues déshydratées), libèrent un mucilage qui peut épaissir un peu la saumure lors des longues fermentations. Le kombu et le wakamé ont une bonne tenue. 

- Les rhizomes comme le gingembre, le galanga, le raifort et le curcuma apportent beaucoup de peps aux préparations. Ils sont aussi riches en levures qui accélèrent la fermentation. Ils permettent une action protectrice pendant la première phase de cette chimie. 


Avant de tailler les légumes… 


- Les légumes conservés entiers ou en gros morceaux seront plus doux au goût et plus fermes en texture. 

- Les légumes taillés finement fermenteront plus vite et leur texture sera plus tendre dans le temps.

- Couper les légumes selon le sens des fibres permet de mieux conserver leur tenue. Contrôlez le temps de fermentation - Au bout de 2 semaines de fermentation les saveurs de vos préparations seront plutôt légères. Plus la fermentation est longue (plusieurs mois) plus les arômes sont intenses.

- Lorsque vous fermentez des fruits, il est intéressant de les faire fermenter légèrement pour conserver une douceur et balancer l’acidité. La présence de sucre provoque une légère fermentation alcoolique apportant à la préparation un côté pétillant.

- Les légumes conservés dans des bocaux en verre hermétiques à joint en caoutchouc peuvent se garder jusqu’à 12 mois sans aucun problème. Si vous utilisez des bocaux à vis, veillez à ce que la saumure recouvre complètement les légumes. L’expérience vous permettra de trouver les bons temps de fermentation selon les préparations et vos goûts.

- La phase de maturation modifie et complexifie les arômes. L’ajout d’un agent d’ensemencement aide à faire démarrer la fermentation plus rapidement et plus sûrement. On l’appelle « activateur ». L’activateur va diriger la fermentation en apportant des bactéries lactiques mais aussi en apportant des saveurs umami. Traditionnellement, il est possible d’utiliser du moût de pain au levain, du jus de choucroute, du petit-lait (animal ou végétal) ou de la saumure d’une précédente lacto-fermentation. Mais il est aussi possible de recourir à des condiments fermentés apportant beaucoup de saveurs et d’arômes complexes et riches en nutriments, comme le miso ou le tamari. Les matières premières

- Préférez évidemment des légumes et des fruits frais, bio et de saison.

- Il est très important de choisir une eau non chlorée. Le chlore étant un antiseptique, il empêche le développement des bonnes bactéries que nous recherchons justement dans l’action de la fermentation. Pour obtenir une eau non chlorée il suffit de laisser reposer l’eau du robinet 12 heures pour laisser s’évacuer le chlore, ou de la faire bouillir puis refroidir pour qu’elle soit utilisable pour faire la saumure. Il est aussi possible de l’adoucir par le biais des carafes filtrantes ou d’utiliser une eau de source.

- Utilisez un sel de mer gris non traité et non raffiné.

- Le plan de travail et les accessoires doivent être propres (eau savonneuse) mais surtout pas aseptisés (eau de Javel ou lingettes antibactériennes). La fermentation a besoin des bactéries présentes dans l’air, sur les ustensiles et même sur les mains (flore microbienne sur la peau) sinon cela risque d’empêcher le bon déroulement de la fermentation.

- On tasse bien les légumes dans leur jus pour chasser l’air. On peut intervenir les 2 ou 3 premiers jours, pour ajouter de la saumure par exemple, mais il faut refermer rapidement le bocal, pour minimiser le contact avec l’air, et ne plus l’ouvrir ensuite. 

- Ne remettez pas dans le bocal un produit qui en a été sorti. 

- Les légumes fermentés sous forme liquide (jus) peuvent créer des boissons toniques et acides riches en probiotiques (betteraves dans de l’eau salée, jus de chou fermenté, carottes et graines de moutarde).


Pour aller + loin : 

Le site web de Shira : https://www.shirabio.com/

Le magazine 95° avec les recettes de Shira 

Le podcast de Shira :


95 degrés · La fermentation éthique et esthétique


Le Live avec Shirabio sur Instagram ci-dessous :

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